Influence du stress sur le cycle menstruelPar la Dre Christina Matera
Il est très commun pour les femmes de vivre du stress pendant le cycle normal de l'ovulation. Il n'est pas rare (et c'est d'ailleurs presque prévisible) qu'il y ait des fluctuations (parfois subtiles, parfois non) dans les menstruations. Il est bien connu que le taux de fécondité diminue pendant les famines et les guerres. Il n'est toutefois pas nécessaire de vivre des événements aussi tragiques pour constater des changements dans ses menstruations. De nombreuses femmes constatent que leurs saignements sont irréguliers, imprévisibles ou retardés lorsqu'elles traversent des périodes particulièrement difficiles comme des dates butoirs à l'école ou au travail, des maladies ou des deuils. Le stress physique comme l'exercice intense et répété ou une perte de poids excessive vient souvent interrompre le cycle menstruel normal des femmes. Il est même possible que les règles ne recommencent pas avant que la stabilité et la tranquillité ne soient de retour.
Cet arrêt du cycle menstruel s'explique parfaitement bien d'un point de vue adaptatif si l'on considère le rôle que joue la reproduction dans le cycle ovarien. C'est comme si le corps essayait de dire « Il y a trop de problèmes en ce moment! Tu ne peux supporter la fatigue et le surmenage d'une grossesse et encore moins la prise en charge d'un nouveau-né. » Il s'agit d'une adaptation logique au stress pour éviter l'accablement.
Il peut sembler curieux que les ovaires répondent aux problèmes émotionnels et physiques même si les femmes savent intuitivement que leur cycle menstruel est susceptible d'être perturbé en raison du stress qu'elles peuvent éprouver à certains moments de leur vie. Ce n'est toutefois pas très étonnant quand on sait que le cycle ovarien mensuel est stimulé par un système bien réglé qui se trouve à l'extérieur de l'ovaire, dans une petite région du cerveau appelée hypothalamus. Cette région clé reçoit de l'information de nombreuses parties du corps ainsi que de l'environnement qui entoure ce dernier. Elle agit comme un poste central en recevant et en organisant une tonne d'informations à laquelle elle répond en donnant des instructions au corps sur la façon de réagir à tous ces stimuli. L'hypothalamus est compartimenté en différents centres qui contrôlent la soif, la faim, la température, la croissance et la reproduction et qui perçoivent la lumière, la noirceur et la douleur. Il influence par ailleurs différentes formes de comportements chez les animaux (et probablement chez les humains). L'hypothalamus fonctionne aussi comme un service de traduction qui aide à déchiffrer les deux principales formes de communication du corps: le système nerveux et le système hormonal (endocrinien). L'information, sous la forme d'activité neurale électrique et d'hormones circulantes, est reçue par l'hypothalamus avant d'être traitée et relayée vers d'autres parties du cerveau et du corps pour que le corps sache comment y répondre. L'organisation de l'hypothalamus place la reproduction parmi les stimuli internes et externes. La reproduction n'est, par conséquent, permise que si le corps est dans un environnement stable, sécuritaire et sain. Si le corps perçoit que la femme n'est pas physiquement ou émotionnellement capable de traverser une grossesse et de prendre soin d'un enfant dépendant et demandant, l'hypothalamus arrête le cycle d'ovulation.
Dans un environnement stable, ce système élaboré entraîne le cycle des menstruations. Tout stress peut cependant modifier la donne. La femme peut alors constater une modification de son flux. Le cycle menstruel peut être allongé ou raccourci. Il peut devenir irrégulier ou parfois continu, avec des saignements abondants ou légers. Une femme peut aussi ne plus avoir de menstruations du tout. Les symptômes prémenstruels si redoutés disparaissent souvent lorsque l'ovulation est interrompue. Le corps de chaque femme répond au stress d'une manière qui lui est propre. Il est donc impossible de prévoir ce qui arrivera. Il se peut qu'une femme ne réagisse pas à un stress alors qu'une autre soit aux prises avec de l'aménorrhée (absence de menstruations). On ne comprend pas tout à fait pourquoi cela arrive, mais il semble que chaque femme ait une résistance au stress qui lui soit propre. Heureusement, quand le stress disparaît et que tout retourne à la normale, il en va de même pour l'ovulation et la fécondité.
Mis à part le désagrément des saignements imprévisibles, le chamboulement de l'ovulation normale peut entraîner de l'anémie (en cas de saignements abondants) et de l'infertilité. Si le système est dérangé au point que les ovaires ne produisent plus d'estrogène, et si cette condition se poursuit sur une longue période de temps, la femme peut voir la densité de ses os diminuer et risquer de souffrir d'ostéoporose. Ce processus adaptatif, qui aide le corps à rediriger temporairement son attention et son énergie vers des éléments plus urgents, peut entraîner des problèmes si la situation persiste.
Heureusement, comprendre le fonctionnement du système reproducteur permet d'offrir des traitements pour minimiser certains des problèmes qui surgissent quand le système va de travers. La pilule contraceptive peut, par exemple, régulariser le flux menstruel en augmentant le taux d'estrogène. Elle peut, bien sûr, n'être utilisée que temporairement en attendant que la situation se stabilise. La médecine moderne propose aussi d'autres moyens de survivre aux événements stressants en attendant que les choses se replacent. Les médecines non traditionnelles, comme la méditation, le massage, l'acupuncture et l'herboristerie peuvent aussi aider à gérer le stress et à rééquilibrer le corps et l'esprit.